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Photo du rédacteurSami Rixhon

Le beau boucan

Montréal, 2050. La dernière salle de spectacle vient de fermer ses portes. La métropole québécoise autrefois si vivante n’est aujourd’hui plus qu’un énorme bloc de béton résidentiel, où le plaisir n’existe plus. Bientôt, ce sera au tour des bars de mettre la clé sous la porte. Montréal se transforme tranquillement en une fade ville de banlieue…



Irréaliste et exagéré? Peut-être. Et pourtant, c’était pour empêcher ce scénario fictif de s’enclencher qu’ils et elles étaient des centaines à manifester devant le cabaret La Tulipe, jeudi soir. Si on ose s’attaquer à La Tulipe, faisant le bonheur du Plateau Mont-Royal depuis plus de 100 ans, qui est réellement à l’abri?


Deux jours avant la mobilisation citoyenne, la Cour d’appel du Québec ordonnait à la mythique salle de spectacle de fermer ses portes à la suite de plaintes répétées à son encontre. Ces plaintes, émises par l’entrepreneur Pierre-Yves Beaudoin, concernaient la nuisance sonore provenant de La Tulipe.


Oui oui, il a été reproché à une salle de spectacle de faire trop de bruit.



Combattre le mal par le mal


Ou combattre le mal par le bien, plutôt. Combattre la censure de la musique par plus de musique. Dès 19h, les manifestants et manifestantes rassemblé·es commencent à se faire entendre à travers un jam improvisé de sifflets, guitares, saxophone et tambours. Beaucoup de tambours. On ressent la même ambiance que celle vécue aux Tam-tams du mont Royal un dimanche après-midi, odeur de cannabis incluse.



Certains et certaines contribuent à ce magnifique vacarme avec des casseroles et des cuillères, vestiges d’un printemps érable qui se fait tranquillement oublier par la communauté.


Montréal se rassemble quand il le faut : on l’a constaté avec l’épopée héroïque des Canadiens en 2021, on l’a aussi vu avec l’éclipse, plus tôt dans l’année, ou encore avec la veillée honorant le défunt Karl Tremblay l’année dernière.


Une nouvelle fois, Montréal honore ce soir sa réputation. On retrouve dans la foule du petit, du grand, du vieux et du plus jeune, tous et toutes uni·es par un amour commun pour l’art. La nuit est tombée depuis des heures, mais le jam ne s’arrête pas, il s’intensifie. Comme la volonté des Montréalais et des Montréalaises de préserver La Tulipe dans leur paysage culturel, dans leur identité.


Si Pierre-Yves Beaudoin se trouve ce soir dans son fameux loft adjacent à La Tulipe, source de tous les ennuis du cabaret, il l’aura sûrement entendu, ce beau boucan. Et il l’entendra encore des semaines durant, jusqu’à ce que les amoureux et les amoureuses de la culture d’ici obtiennent gain de cause et sauvent l’indémodable La Tulipe.


Je leur souhaite de tout cœur.


Mention photo : Alice Young

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