Un long métrage à filtre monochrome où les personnages montrent leurs propres couleurs ; Charlotte a du fun. Ce film, réalisé par Sophie Lorain, nous fait découvrir les facettes qui composent la vie sexuelle d’une jeune adolescente.
La première caractéristique frappante du film est sans doute son utilisation d’objectifs allemands datant des années 1930. Importés d’Allemagne, ils ont été choisis avec prédilection puisqu’ils créent des images à courtes profondeurs de champ. Produisant un arrière-plan légèrement embrouillé, ils contribuent à adoucir le sujet traité, comme l’explique la réalisatrice Sophie Lorain. Bien que, généralement, l’utilisation d’une palette de couleurs noire et blanche soit appliquée pour traduire un drame à l’écran, elle est ici utilisée dans une comédie. Aux premiers abords, on ne comprend pas la finalité de cette utilisation, mais, à travers le film, la palette absente de couleurs apporte à ce dernier un sens utopique. L’œuvre Charlotte a du fun immerge les spectateurs dans le chapitre de la vie d’une jeune adolescente, dans la découverte et la curiosité de sa propre sexualité.
Le long métrage traite d’un sujet en vogue, mais par opposition à la tendance : il le traite dans un ton humoristique plutôt que dans le drame. Tout au long de l’œuvre, on peut remarquer l’absence des adultes, qui vise à ne pas incorporer un aspect moralisateur. Cette décision de réalisation permet au film d’aborder un thème tabou sans remanier l’histoire sans réprimande. Le choix de la réalisatrice de censurer les images de nudité est approprié, dans le sens où le spectateur peut très bien comprendre les actions sans être froissé par les images perçues à l’écran. Selon Sophie Lorain, cette décision a été prise afin de ne pas créer une « onde de choc », afin de concentrer l’attention sur le message véhiculé. Le mélange de censure et de filtre noir et blanc concentre l’attention de l’audience sur les dialogues, et du même coup, sur le sens des images plutôt que sur leurs détails.
Tout de même, ce long métrage traite en surface un sujet extrêmement lourd, dans une société où la sexualité est revendiquée comme un libre choix. Et même si l’on se dit une société de plus en plus ouverte à cette idée, l’honnêteté des jeunes de cet âge demeure extrêmement crue. Or, les interactions entre les personnages représentées dans le film sont fortement idéalisées. Loin de dire que la sexualité ouverte du personnage principal est inappropriée, il faut simplement comprendre que la société actuelle juge fortement ces comportements, particulièrement à l’adolescence. Dans cet ordre d’idée, le film Charlotte a du fun illustre davantage une évasion qu’une réalité.
En revanche, tout ce qui englobe l’esthétique de l’œuvre est éblouissant. En commençant par le choix du noir et blanc jusqu’aux plans séquence. Ces scènes, tournées en continu et difficiles à réaliser dans cette absence de montage, composent une harmonieuse mélodie. En outre, durant la représentation complète du long métrage, une proximité avec les personnages est établie par l’éventail des plans rapprochés. Ces gros plans, centrés sur les personnages, sont tournés de manière à ce que le spectateur s’introduise dans le quotidien de Charlotte.
Dans son ensemble, le film Charlotte a du fun réussi à aborder, sous un air de comédie, un sujet d’un grand intérêt social. Malgré son léger manque de réalisme dans le traitement du thème, ce long métrage pourrait aider certains individus à faire leur cheminement dans l’acceptation de leurs propres choix.
Komen